dimanche 19 mai 2019

FLÂNERIE DANS LES RUES

Nous-nous sommes retrouvés avec mon épouse à flâner dans les vieilles rues de Rouen juste pour le plaisir, accompagnés de ma fille et de mon gendre. J'en ai profité pour prendre quelques photos. C'est une ambiance que j'aimerais vous faire sentir. Regardez les photos rapidement. Puis si l'une d'entre-elles vous accroche, le commentaire vous aidera à la resituer historiquement.
J'ai bien conscience que mon reportage est un peu long mais c'est celui d'une flânerie faite en famille pour le seul plaisir de regarder, de sentir, de partager...



Ma voiture garée au parking de l'Hôtel de ville, c'est Napoléon qui nous invite à la promenade.
Les prussiens en 1871 n'avaient pas osé récupérer le bronze de cette statue équestre fondue à partir des canons de la bataille d'Austerlitz et inaugurée le 15 août 1865 sous Napoléon III.

Sur cette place c'est un pure chef-d'oeuvre de l'architecture gothique qui attire nos regards émerveillés.
-L'admirable tour de croisée de l'abbaye St-Ouen date du XV-XVI° siècles-
Une petite interprétation symbolique sur cette tour de croisée : la couronne du duc de Normandie domine à droite la tiare du pape et à gauche celle du roi. Être Normands, c'est appartenir à une civilisation dominante et en avoir conscience tant sur les plan historique, économique, culturel... N'oublions pas la fameuse "charte aux Normands" concédée par le roi de France en 1149.

L'abbaye Saint-Ouen est le trésor incontestable du style gothique le plus élaboré du XV° siècle. Les moines étaient faits pour une vie séculière bien réglée au sein d'une clôture qui les séparait de la vie profane. L'abbaye fut donc d'abord construite à l'extérieur de l'enceinte des fortifications des le VI° siècle.
Puis le viking Rollon, premier duc de la Normandie, leur concéda toutes les terres fertiles et maraîchères des vallée du Robec et de l'Aubette jusqu'à Darnetal, un vaste territoire qui assura leur autonomie alimentaire et économique jusqu'à la Révolution de 1789.

Les abbés de l'abbaye, issus de la haute noblesse, furent des gestionnaires avisés avec sous leur contrôle des granges, des moulins, des fours, des ateliers artisanaux, des étables, des bergeries et des viviers de poissons que les moines consommaient en période de carême.

A l'origine cette abbaye portait le nom de l'évêque Dagon qui fut déformé en Ouen.

C'est d'abord, une grande église romane fut édifiée vers 1066, sous Guillaume le Conquérant. Mais deux incendies majeurs détruisent cet édifice en 1136 et 1248.

L'abbé Jean Roussel, surnommé Marc d'Argent, le 13 mai 1318, un architecte d'un immense talent, conçut les plans de l'église abbatiale totalement gothique que nous connaissons. Elle fut construite dans une unité de style au cours des siècles suivants, ce qui est exceptionnel. 
Nous avons donc à Rouen un exemple parfait des savoirs faire des XIV° et XV° siècles.




-un ancien oriol-
En traversant la Rue des Faulx mon regard, en quête d'insolite, est attiré par un des anciens Oriols, sortes de pavillons construits au dessus des toitures pour assurer les veilles notamment contres les incendies.

Puis, nous-nous engageons dans la rue des Boucheries Saint-Ouen qui mène à la pittoresque Place du Lieutenant Aubert avec au bout de la rue d'Amiette un autre joyau : l'église Saint-Maclou.


-Place du Lieutenant Aubert, avec le clocher de Saint-Maclou-
Cette très pittoresque place est au Moyen-Âge la plus grande de la cité et s'y tenait une fois pas an la "fête de la Confrérie des Connards", sorte de carnaval populaire dont je parle dans un autre article.

Nous avons rendez-vous au 196 rue de la rue Eau de Robec, invités par notre fille à découvrir une table rouennaise : "LES GENS HEUREUX" dans une belle maison du XVI°-XVII° siècles


-Un cadre chaleureux et original-


-Une ambiance bien particulière et bon enfant dans une vieille demeure-


-Avec Valéry et Hélène: un moment de convivialité familiale-


-Les menus changent toutes les semaines dans ce sympathique restaurant-


-"FANNY", la patronne est vraiment très accueillante et ma foi bien jolie-





 Le charme des vieilles maisons à pans de bois s'allie parfaitement avec un rez-de-chaussée en pierres de calcaire venant des carrières de la vallée de la Seine à partir du XVII° siècle.


-Mon plat préféré : un tatin de carottes au caramel-
Après ce repas, nous reprenons notre balade, rue Eau de Robec qui réserve de belles surprises comme cette histoire vraie sculptée dans la pierre au N°186 : le propriétaire de cette maison eut la vie sauve grâce à son cheval. Désarçonné dans la forêt des Essarts, toute proche de la ville, en direction d'Elbeuf, et s'étant sérieusement blessé, son cheval eut le réflexe étonnant de rentrer à l'écurie et de donner l'alerte pour reconduire les proches et les voisins de notre compère vers l'endroit de l'accident. Très reconnaissant ce bourgeois rouennais demanda à un tailleur de pierres d’immortaliser, par cette superbe frise, l'événement.





Flaubert appelait la rue Eau de Robec "l'affreuse petit Venise" . Il faut imaginer jusqu'à la fin du XIX° siècle les grandes perches perpendiculaires aux façades sur lesquelles séchaient les rouleaux de draps. La lumière avait de la peine à venir jusqu'aux rez-de-chaussées des artisans teinturiers. C'était une rue mal famée et de prostitutions qu'il valait mieux éviter.



Aujourd'hui, cette rue est une des plus touristiques du vieux Rouen. Elle a un charme fou.



Je vous renvoie à un article dans la rubrique "Activités" consacré à l'histoire de la draperie  liée à cette rue.



Dans cette demeure datant de 1757, est né Edouard Adam, un savant qui assura la prospérité des vignobles avec une méthode scientifique propre à retirer du vin du midi de la France toutes ses parties spiritueuses.

Ensuite nous faisons demi-tour pour enfiler la rue d'Amiette, autrefois la frontière entre les quartiers bourgeois de l'Ouest de la cité et les quartiers les plus populaires de l'Est. C'est la rue des antiquaires de Rouen, des armoires normandes et de bien d'autres curiosités locales, telle la faïence, les miroirs, les vieux tableaux, attendent les amateurs.










Cette maison gothique est superbe avec son double encorbellement. On peut donc la situer au début de la Renaissance, avant 1520.
Par la rue d'Amiette nous arrivons place Barthélémy sur le parvis de l'église Saint-Maclou.



Les maisons à pans de bois rendent cette place incontournable dans notre promenade au cœur de la cité que l'on peut situer historiquement au moment de l'essor de la Renaissance.



Ces deux maisons de niveaux différents reliées par un escalier intérieur donnent cet aspect curieux, place Barthélémy, à cet ensemble architectural.


-La rue d'Amiens vaut à elle seule un reportage-

Une brève échappée sur la rue d'Amiens montre la richesse du patrimoine rouennais que nous devrons aussi mettre en valeur dans une prochaine promenade.



Hélène, ma fille, avec Annick, mon épouse, cherchent une pièce à donner à un chanteur de rue.



Le mélange des styles montre que l'architecture est au cœur de l'histoire de Rouen




La fameuse rue Malpalu (mauvais marais en vieux français) a une sinistre histoire liée à la "peste noire" importée d'Asie par les navires marchands via les rats et leurs puces. Nous avons au dessus du secrétaire du salon une aquarelle, oeuvre d'André Le Noir, qui représente cette rue avec au fond la tour de croisée de l'abbaye de Saint-Ouen.
Avant la construction de ces maisons, ce sont les vergers de l'archevêché le long des berges de la Seine qui remontaient jusqu'ici.
Toutes les maisons, les églises reposent sur des pieux enfoncés profondément dans le sol très humide et mouvant.




L'église Saint Maclou (saint Malo en breton) dont le parvis en arc de cercle est un édifice charnière. 

C'est l'ultime expression du style gothique flamboyant dans sa forme la plus sophistiquée juste avant l'éclosion du style Renaissance. 

Le duc anglais de Bedford décida, pour sans doute se faire pardonner de l'exécution de Jeanne d'Arc, dont il se sentait coupable, de faire reconstruire en 1436 ce chef d'oeuvre exubérant de joie. 

Rouen fut depuis la plus haute antiquité toujours liée à l'Angleterre par son commerce, son histoire maritime et culturelle. 

Cette église apparaît aussi comme le phare de l'extension de la cité vers l'Est, vers les vallées du Robec, de l'Aubette et de leurs nombreux moulins.

Nous traversons la rue de la République pour un bref passage rue Saint Romain que j'évoque dans un autre article.


-La rue Saint-Romain avec à gauche l'austère archevêché du XIV°siècle et à droite des maisons du XVII° siècle-

Nous virons à droite dans une charmante ruelle reliant la rue Saint-Romain à la rue Saint-Nicolas. C'est la rue des chanoines qu'il faut absolument enfiler pour s'imprégner de l'ambiance de la vieille ville. 



Puis nous sommes replongés avec  la rue Saint-Nicolas dans l'atmosphère commerciale de tout temps qui anime la capitale normande.


-Rue Saint-Nicolas cette maisons bleue est typiquement du XVIII° siècle-
-Hélène et Annick chinent dans la boutique " Karma" des objets décoratifs très originaux et chaleureux-


Puis nous nous dirigeons vers notre parking de l'Hôtel de ville en prenant la petite rue Saint-Amant, elle aussi pittoresque. C'est le quartier des boîtes de nuit, très animé en soirée pour les célibataires en quête de rencontres.



La place Saint- Amant clôture notre escapade. J'espère tout simplement vous avoir sensibilisé et intéressé à l'ambiance du centre-ville historique de Rouen.



Au fond à gauche les vestiges de l'abbaye Saint-Amant reconvertis en appartements. Sur cette place très pittoresque, c'est le buste de Claude Monet, le maître de l'Impressionnisme,  réalisé par le sculpteur  contemporain et rouennais, Jean-Marc de Pas, qui vous salue.